Prescription action héritiers

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Posté le Le 14/02/2025 à 14:11
Bonjour,

Ma question concerne la prescription d’une action en nullité de donation par l’héritier du donateur (donation entre vifs).

L'héritier ne peut-il pas opposer son impossibilité à agir du vivant du donateur, selon 2234 du Code Civil, et disposer ainsi de cinq années pleines quel que soit le motif de demande de nullité (insanité d'esprit, violence...), et ce, indépendamment de la non action du donateur de son vivant et donc de périodes de non suspension de l’action du vivant du donateur, qui viendraient sinon en retranchement de ces cinq années?

Je vous remercie de votre éclairage.

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Posté le Le 14/02/2025 à 14:59
Bonjour,

Cela va dépendre du motif de demande de révocation. Si le donateur, sain d'esprit, a décidé de ne pas agir de son vivant alors qu'il en avait la possibilité, la prescription est acquise même à l'égard de ses héritiers.

La loi prévoit même dans certains cas que les héritiers ne puissent pas faire de recours ou dans un délai plus bref : révocation pour survenance d'enfant, révocation pour ingratitude... :
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006070721/LEGISCTA000006150546/#LEGISCTA000006150546

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Modératrice

Posté le Le 14/02/2025 à 15:32
Bonjour

Beaucoup a déja été dit :
https://www.forum-juridique.net/justice/prescription-action-nullite-t56156.html

Cdlt

Posté le Le 14/02/2025 à 18:12
Je remercie vivement le contributeur.

Il y a un point résistant que je souhaiterais comprendre.

Je souhaiterais comprendre pourquoi il semble exister un droit propre/autonome de l’héritier au décès du donateur dans le cas du motif d’insanité d’esprit et qui entrainerait l’octroi de cinq années d’action possible au décès du donateur, indépendamment du temps non suspendu du vivant du donateur alors que le droit de l’hériter sur les autres motifs semble être seulement celui hérité dans le patrimoine du dé cujus, donc amputé du temps non suspendu du vivant du de cujus.

L’insanité d’esprit est possiblement réversible, pourquoi cette différence de traitement juridique de la prescription de la demande en nullité entre l’insanité juridique et les autres motifs de nullité, si tel était vraiment le cas ?


Dans tous les motifs de vice du consentement comme dans le cas de l’insanité d’esprit, l’héritier est bien dans l’impossibilité légale d’agir du vivant du donateur, impossibilité d’agir retenue par 2224 du Code Civil pour repousser le départ de la période de prescription.

https://www.efl.fr/actualite/precisions-prescription-nullite-trouble-mental-invoquee-heritier_f593a242b-c768-4923-8787-befd75ea471a

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Posté le Le 14/02/2025 à 18:38
Le délai de prescription court à partir du moment où celui qui a le droit d'agir en nullité a eu la possibilité de le faire. L'insanité d'esprit suspend la prescription à cause de la force majeure (article 2234 du Code civil) ou de la tutelle (article 2235 du Code civil). C'est logique, la personne n'étant pas mesure d'agir.

Dans le cas où la personne recouvre son discernement avant de décéder, la prescription recommence à courir à compter de sa guérison.

La page que vous citez concerne l'action d'un fils dont le père est décédé sous tutelle. La particularité était que ce fils avait la qualité de tuteur.

La Cour de cassation a jugé que la prescription ayant été suspendue pendant toute la durée de la tutelle (soit jusqu'au décès), l'héritier était dans son droit en agissant dans les cinq ayant suivi le décès. Et ce même si le fils aurait pu agir du vivant de son père et au nom de celui-ci en qualité de tuteur.

Si le père avait recouvré ses esprits six ans avant son décès, la prescription aurait été acquise lors de son décès.

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Modératrice

Posté le Le 14/02/2025 à 19:25
Merci beaucoup de votre contribution qui apporte encore un nouvel éclairage.

Je précise que le donateur a fait l'objet d'une tutelle la dernière année de sa vie, la donation avait eu lieu presque dix ans avant.

Je relayais le lien car l’analyse de Madame PETERKA amenait à préciser que dans le cas d’actes à titre gratuit, l’héritier disposerait d’un droit propre/autonome, donc potentiellement de cinq années pleines au décès (à la différence du mode de calcul pour les actes à titre onéreux où il ne dispose que d’un droit issu du patrimoine du de cujus donc amputé des périodes non suspendues du vivant du donateur, ce qui était le cas dans l’affaire citée en lien).

Que faut-il entendre par droit propre/autonome de l’héritier dans le cas d’actes gratuit ? cela n'entraine t-il pas la non prise en compte de périodes non suspendues du vivant du donateur en décote des cinq années octroyées à l'héritier? ce délai n'est-il donc pas forcément de cinq années pleines (sans décote) octroyé à l'héritier au décès du donateur ?[/b]

Que veut dire le passage de l’ancien article 1304 « Il ne court contre les héritiers de l'incapable que du jour du décès, s'il n'a commencé à courir auparavant » ?


Je lis par ailleurs lors de multiples décisions de la cour de cassation : "La prescription de l'action en nullité d'un acte à titre gratuit pour insanité d'esprit court, à l'égard de l'héritier, à compter du décès du disposant": faut-il comprendre de la même façon qu'un délai de cinq années, sans décote de temps non suspendu du vivant du donateur, est automatiquement octroyé à l'héritier? non, ce n'est pas le cas? seulement dans le cas de motif d'insanité d'esprit? quel que soit le motif invoqué?

L’héritier, n’a pas le droit d'agir du vivant du donateur, le droit l’interdit d’autant plus s’il n’est pas tuteur, la prescription ne devrait donc pas pouvoir courir contre lui, d’autant plus s’il dispose d’un droit propre indépendant de celui hérité dans le patrimoine du de cujus et ce, indépendamment du motif invoqué ?

Merci beaucoup de votre aide.

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Posté le Le 16/02/2025 à 12:13
Bonjour,

Je me permets de reprendre précisément le passage rapporté et la source :

« Ensuite, la Cour de cassation distingue le régime de la prescription de l’action en nullité pour trouble mental des actes à titre onéreux et des actes à titre gratuit. Si, dans le premier cas, l’action de l’héritier est celle de son auteur, dans le second, il s’agit d’une action autonome, dont le point de départ est reporté au décès du disposant, en raison de l’impossibilité pour les héritiers de l’introduire avant cette date, les libéralités étant le plus souvent découvertes au décès du disposant (Cass. 1e civ. 20-3-2013 n° 11-28.318 FS-PBI : BPAT 3/13 inf. 101 ; Cass. 1e civ. 29-1-2014 n° 12-35.341 F-PB : BPAT 3/14 inf. 133 ; Cass. 1e civ. 8-3-2017 n°16-12.607 FS-PB : BPAT 3/17 inf. 113). »

https://www.efl.fr/actualite/precisions-prescription-nullite-trouble-mental-invoquee-heritier_f593a242b-c768-4923-8787-befd75ea471a

Faut-il déduire de cette analyse que l’héritier, agissant en nullité d’un acte gratuit sur le motif de l’insanité d’esprit, du fait de son action autonome dans le cas d’acte gratuit, dispose au décès du disposant de 5 années pleines sans « décote » de périodes non suspendues du vivant du disposant ?

Cette analyse de l’action autonome dans le cas d’acte gratuit, vaut-elle pour d’autres motifs de demande de nullité, comme le vice de violence par exemple, avec pour conséquence l’octroi d’un délai d’action de 5 années sans décote de période de non suspension du vivant du disposant, courant à partir du décès du disposant ?

Merci infiniment de votre éclairage.

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Posté le Le 16/02/2025 à 12:38
Bonjour,

Citation :
Faut-il déduire de cette analyse que l’héritier, agissant en nullité d’un acte gratuit sur le motif de l’insanité d’esprit, du fait de son action autonome dans le cas d’acte gratuit, dispose au décès du disposant de 5 années pleines sans « décote » de périodes non suspendues du vivant du disposant ?

Oui. Cela résulte de l’article 414-2 du code civil lorsque l’action en nullité porte sur un acte gratuit, donation ou testament et uniquement au motif de l’insanité d’esprit à la date de l’acte.

Citation :
Cette analyse de l’action autonome dans le cas d’acte gratuit, vaut-elle pour d’autres motifs de demande de nullité, comme le vice de violence par exemple,

Non puisque le motif de l’action en nullité ne porte pas sur le motif de l’insanité d’esprit seul motif prévu à l’article 414-2 du code civil.

Posté le Le 16/02/2025 à 17:13
Merci beaucoup de votre retour.

1. On part donc du principe que l’insanité d’esprit lors d’un acte gratuit, qui peut n’être que très passagère, crée donc une impossibilité d’agir constante jusqu’au décès du disposant dans tous les cas ?

2. 414-2 ne traite que de l’insanité d’esprit. Quel texte permet de dire que, concernant le vice de violence, dans le cas d’un acte gratuit, le droit de l'héritier n’est plus autonome, mais celui transmis dans le patrimoine du de cujus, et donc qu’il faille, sur ce motif, retrancher les périodes de non suspension du vivant du donateur ?

3. Concernant le vice de violence, comme sur d’autres motifs, l’héritier ne pouvait pas agir du vivant du donateur, le droit l'interdit, pourquoi alors considérer qu’il ne dispose pas de cinq années pleines au décès du donateur en application de 2234 Code Civil?

Merci beaucoup de vos précisions.

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Posté le Le 16/02/2025 à 17:37
1) Non, mais peu importe puisque, pour le motif de l’insanité d’esprit, l’héritier dispose d’un autre droit à agir qui naît à l’instant du décès.

2) Les textes de droit commun dont l'article 2234.

3) L’article 2234 vise des droits que l’on possède mais que l’on est dans l’impossibilité d’exercer et non des droits que l’on ne possède pas. Avant le décès, l'héritier ne possède aucun droit. Si vous n’arrivez pas à le comprendre, appliquez la règle des 5 C : C’est Con mais C’est Comme Ca.

Cette fois-ci j’arrête définitivement.

Posté le Le 16/02/2025 à 18:40
Merci de votre réponse.

C’est justement parce qu’il y a ce point que je n’ai pas compris, et qui peut être n’a pas été purgé, que je me suis permis d’élargir l’échange à d'autres contributeurs.

Il m’est expliqué que 2234 du Code Civil ne s’applique pas pour les différents motifs de nullité car l’héritier ne possède pas de droit du vivant du disposant, mais c’est justement ce qui motive le fait que dans le cas de l’insanité d’esprit, la prescription ne commence à courir vis-à-vis de l’hériter que du jour du décès!

"Si, dans le premier cas, l’action de l’héritier est celle de son auteur, dans le second, il s’agit d’une action autonome, dont le point de départ est reporté au décès du disposant, en raison de l’impossibilité pour les héritiers de l’introduire avant cette date"

Que comprendre ?

Par ailleurs, oui, je ne comprends pas pourquoi le motif d’insanité d’esprit entraînerait un droit autonome et donc un droit à agir de cinq années pleines au décès alors que ce ne serait pas le cas pour les autres motifs.

Je ne pense pas qu’il n’y ait pas de fondement au traitement différencié de l’insanité d’esprit et des autres motifs.

Quid également de l’application de l’ancien 1304 du code civil ? Hors sujet ?
Il me semblait avoir lu de différentes décisions de justice, qu’il pouvait s’appliquer également dans le cas d’insanité d’esprit et pas seulement strictement au majeur sous protection, par extension : « Il ne court contre les héritier de «la personne en tutelle ou en curatelle ou de la personne faisant l'objet d'une habilitation familiale, que du jour du décès, s'il n'a commencé à courir auparavant »[/b]

Merci infiniment Madame, Monsieur, Isadore ou quelqu'un d'autre, des précisions et explications que vous pourriez m’apporter.

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Posté le Le 17/02/2025 à 11:10
Je ne suis pas juriste, je crois que ce que j'avance n'est pas aberrant. Merci de votre explication.
Et si quand bien même ce que j'avançais était aberrant, merci de m'expliquer pourquoi ce soit le cas.
Merci aux contributeurs de leur aide.

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Posté le Le 19/02/2025 à 12:43
Bonjour,
Quelqu'un peut-il m'apporter son éclairage?
Merci infiniment de votre aide.

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Posté le Le 20/02/2025 à 18:52
Bonsoir,

Je fais suite à mes précédents posts.

"On ne peut faire reproche à l’héritier de ne pas avoir agi à une époque où il ne disposait pas de cette prérogative. Actioni non natae non praescribitur ; pas de prescription de l’action avant sa naissance."

N'est-ce pas ici un élément qui montre que l'héritier ne pouvant agir du vivant du donateur, il dispose de l'entièreté des 5 années, quel que soit le motif de demande de nullité de l'acte?

Merci vraiment de votre aide.

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