Dans quel cas peut-on se rétracter d'une commande ?
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Procédure
Posté le Le 31/10/2022 à 19:19
Bonjour,
La Cour de cassation a rendu, le 3/07/2013, un arrêt stipulant qu'une vente dont le paiement est échelonné, différé ou fractionné, est assimilée à une opération de crédit à la consommation offrant à l’acquéreur une faculté de rétractation (chambre civile 1 - Audience publique
du mercredi 3 juillet 2013 - N° de pourvoi: 12-20238).
Est-ce que les évolutions ultérieures du code de la consommation ont pu rendre caduque cet arrêt ?
Et si cet arrêt est toujours valable, peut-on en déduire que toute commande dont le paiement n'est pas effectué au comptant doit être rédigée sur un bon de commande muni d'un volet de rétractation ?
Je vous remercie pour vos contributions à cette réflexion.
Cordialement
 
Posté le Le 01/11/2022 à 08:13
Bonjour,
Un paiement fractionné sur 3 mois et sans frais n'est pas considéré comme un crédit à la consommation.
Ce n'est qu'une facilité de paiement.
Posté le Le 01/11/2022 à 09:11
Bonjour Morobar,
Si, justement, c'est le sens de l'arrêt de la Cour de cassation : un paiement fractionné sur 3 mois et sans frais est assimilé à une opération de crédit à la consommation. L'arrêt a été rendu suite à une vente - réalisée en 2010 - faisant l'objet d'un paiement fractionné en 6 mensualités.
Mes questions portent sur la pérennité de cet arrêt (depuis 2013, des modifications législatives ont-elles pu le rendre caduque ?) et sur son impact sur les bons de commande utilisés (doivent-ils être munis d'un volet de rétractation si le paiement n'est pas réalisé au comptant ?).
Cordialement
Posté le Le 01/11/2022 à 09:17
Bonjour,
L'article L311-2 du code de la consommation indiquait, jusqu'au 1er mai 2011 :
Citation :
Article L311-2
Version en vigueur du 27 juillet 1993 au 01 mai 2011
Création Loi 93-949 1993-07-26 annexe JORF 27 juillet 1993
Les dispositions du présent chapitre s'appliquent à toute opération de crédit, ainsi qu'à son cautionnement éventuel, consentie à titre habituel par des personnes physiques ou morales, que ce soit à titre onéreux ou gratuit.
Pour l'application du présent chapitre, la location-vente et la location avec option d'achat, ainsi que les ventes ou prestations de services dont le paiement est échelonné, différé ou fractionné, sont assimilées à des opérations de crédit.
C'est sur cet article que se basait la jurisprudence dont vous parlez.
Depuis, le code de la consommation a été grandement modifié, en particulier :
Citation :
Article L312-4
Modifié par Ordonnance n°2016-351 du 25 mars 2016 - art. 2
Sont exclus du champ d'application des dispositions du présent chapitre :
[...]
5° Les opérations de crédit comportant un délai de remboursement ne dépassant pas trois mois qui ne sont assorties d'aucun intérêt ni d'aucuns frais ou seulement d'intérêts et de frais d'un montant négligeable ;
__________________________
Superviseur
Posté le Le 01/11/2022 à 09:52
Bonjour janus2,
Je vous remercie pour ces informations.
Après relecture des articles L311-1, L311-2, L312-4, L312-19 et L312-21 dans leur version actuelle, voilà ce que je comprends :
- sont assimilables à des opérations de crédit les paiements qui ne sont pas réalisés au comptant, sous réserve que leur montant soit compris entre 200 et 75.000 euros et que le délai accordé pour le remboursement dépasse 3 mois ;
- l'emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit ;
- un formulaire de rétractation détachable doit être joint à son exemplaire du contrat de crédit.
Avez-vous la même lecture ?
Cordialement
Posté le Le 01/11/2022 à 13:18
Bonjour Chaussetteàneige,
Citation :
Et si cet arrêt est toujours valable,
Je reviens sur cet aspect de votre question.
La Cour de Cassation n'est pas une instance législative officielle. Ses décisions n'ont donc pas force de loi.
Simplement, vous pourriez vous baser sur cet arrêt, faire un procès, faire évoquer cet arrêt au juge qui s'occupe de votre affaire et espérer que VOTRE juge ira dans le même sens que les juges de Cassation. Même si c'est fréquent, il n'y a pas de certitude.
Sinon, pour le reste, je comprends comme vous.
Posté le Le 01/11/2022 à 13:38
Cette jurisprudence s'appuyait sur le code de la consommation tel qu'il existait à l'époque. Depuis, il a été modifié. Avant, tout paiement échelonné était considéré comme un crédit, aujourd'hui, un paiement en 3 fois sans frais n'est plus considéré comme un crédit par le code de la consommation. On ne peut donc pas appliquer cette jurisprudence à ce type de paiement.
__________________________
Superviseur
Posté le Le 01/11/2022 à 13:50
Oui, Janus
Votre message de 09:17 était très clair, et ce n'était pas la peine de le répéter.
Mon intervention ne visait qu'à corriger la position initiale de Chaussetteàneige qui attribuait valeur de loi à une décision de la Cour de Cassation.
Posté le Le 01/11/2022 à 16:14
Citation :
Votre message de 09:17 était très clair, et ce n'était pas la peine de le répéter.
Il me semblait, au contraire, nécessaire d'apporter cette précision dans la mesure où vous disiez qu'il est toujours possible aujourd'hui de s'appuyer sur cette jurisprudence. Or, ce n'est pas vrai dans tous les cas.
__________________________
Superviseur
Posté le Le 01/11/2022 à 16:18
Je vous remercie, AGeorges et janus2, pour ces informations qui ne facilitent pas ma démarche en cours, mais qui m'évitent d'envoyer une cellule d'aide associative dans le mur.
En effet, ce n'est pas pour l'usage personnel de mon épouse et moi-même que je recherche cela. Nous, notre procédure judiciaire est derrière nous (3 ans de procédure pour une installation photovoltaïque abandonnée par l'entreprise en charge du projet). Et elle s'est bien terminée pour nous.
Depuis, j'ai souhaité m'engager auprès de l'association qui nous a aidés ; au sein de celle-ci, une cellule de bénévoles reçoit les messages de particuliers, pour beaucoup victimes du discours rôdé de commerciaux peu scrupuleux et sévissant sur les stands de foires et salons.
Lorsque ces particuliers réalisent que le devis qu'ils ont signé est un bon de commande maquillé, ou bien que le montant des travaux proposés est déraisonnable ou trop élevé pour leur budget, ils essaient de se rétracter. Mais les commerciaux leur indiquent qu'à l'exception des dossiers adossés à une demande de crédit affecté, il ne leur sera pas possible de se rétracter.
Actuellement, un moyen de défense est le recours à l'ordonnance de la Cour de Justice Européenne (affaire C-465/19 du 17/12/2019).
Mais le chemin est long et incertain, et il est souvent nécessaire d'entrer en procédure judiciaire pour présenter cette ordonnance. Qui n'est pas transposé dans le code de la consommation (nous travaillons également cet axe).
L'idéal, pour le moment, serait de prouver qu'un bon de commande non assorti d'un volet de rétractation est caduque sous certaines conditions. Ainsi, notre cellule d'aide permettrait aux victimes d'annuler leur commande sans entrer dans la spirale judiciaire infernale que mon épouse et moi-même avons vécue pendant 3 ans.
Voila pourquoi j'essaie de retrouver, dans le code de la consommation, l'argumentaire développé par le Cour de cassation.
Pouvez-vous m'aider ?
Cordialement
Posté le Le 01/11/2022 à 17:03
Bonsoir Chaussetteàneige,
Votre intention est compréhensible, mais face à un processus législatif souvent fort long, et à raison, je ne suis pas sûr du tout que vous puissiez aider ceux qui se sont déjà fait rouler.
Par contre, dans un cadre associatif, vous pouvez très bien agir en prévention dans votre cadre régional.
1. Vous montez une plaquette ou un petit livret reprenant tout ce qu'il faut vérifier, incluant les avertissements qui doivent être présents sur les stands, et la non-validité du délai de rétractation en l'absence de crédit.
2. Vous distribuez ces petits livrets à l'entrée des salons de votre région.
La réflexion du législateur, si je l'ai bien comprise, a été de se baser sur l'aspect origine de la volonté. Si un vendeur vous démarche chez vous, si un vendeur vous propose sur internet un produit ou un service et donc qu'il entre chez vous via un écran, alors vous êtes "sollicité" et cela vous ouvre des droits.
Mais personne ne vous a obligé à aller dans une foire ou un salon. C'est vous qui l'avez décidé. C'est aussi vous qui avez décidé de vous approcher de tel ou tel stand, même si, à ce moment, vous êtes "accroché" par un vendeur.
L'initiative de la transaction est chez vous, et vous avez moins de droits.
Je ne suis pas sûr que ce processus soit réversible. Si tout un chacun peut aller solliciter des entreprises pour acheter des biens ou des services et peuvent ensuite se rétracter facilement, il y aura abus et le tissu économique en souffrira.
La loi essaye donc de protéger à la fois le consommateur et le vendeur. Le 'vendeur' travaille et étudie pour voir ce que la loi lui permet de faire, et le consommateur oublie la maxime "nul n'est censé ignorer la loi". Il y a donc un déséquilibre. La réponse peut-elle être de déséquilibrer la loi ?
Participer, dans un cadre associatif, à l'éducation du consommateur est donc un beau projet. Le reste risque d'être hors de portée.
Ma réponse n'est pas très juridique, désolé.
Posté le Le 01/11/2022 à 19:58
Bonsoir AGeorges,
Je vous remercie pour ces éléments complémentaires. Les 12.000 adhérents de notre association sont répartis sur l'ensemble du territoire. C'est donc à l'ensemble des foires et salons que nous souhaitons nous adresser.
Je sais que le processus législatif est long, nous avons lancé notre 1ère campagne de sensibilisation des parlementaires en avril 2019. Ceux-ci ont répondu en déposant 74 questions écrites et 3 propositions de loi. Nous aidons les personnes qui se sont fait rouler en travaillant avec eux sur la meilleure défense à apporter.
Nous ne luttons pas contre les vendeurs, mais seulement contre les malhonnêtes qui mentent à leurs prospects. Les entreprises honnêtes n'ont aucun souci pour patienter 14 jours avant de planifier les chantiers.
De nombreuses personnes entrent dans les foires et salons pour prendre des informations, pas pour contracter une commande.
Je ne pense pas que nous déséquilibrions la loi en protégeant les personnes en état de faiblesse.
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