Je pense que c'est un peu plus complexe. Essayons de faire une analyse au regard des textes.
1) La jouissance légale est attachée à l'administration légale, laquelle est associée à l'autorité parentale. Cette jouissance légale cesse aux 16 ans de l'enfant (et dans d'autres cas).
Citation :
Article 382
L'administration légale appartient aux parents. Si l'autorité parentale est exercée en commun par les deux parents, chacun d'entre eux est administrateur légal. Dans les autres cas, l'administration légale appartient à celui des parents qui exerce l'autorité parentale.
Citation :
Article 386-1
La jouissance légale est attachée à l'administration légale : elle appartient soit aux parents en commun, soit à celui d'entre eux qui a la charge de l'administration.
Citation :
Article 386-2
Le droit de jouissance cesse :
1° Dès que l'enfant a seize ans accomplis ou même plus tôt quand il contracte mariage ;
2° Par les causes qui mettent fin à l'autorité parentale ou par celles qui mettent fin à l'administration légale ;
3° Par les causes qui emportent l'extinction de tout usufruit.
2) La jouissance et l'usufruit sont des synonymes juridiques.
Citation :
Article 578
L'usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance.
Citation :
Article 582
L'usufruitier a le droit de jouir de toute espèce de fruits, soit naturels, soit industriels, soit civils, que peut produire l'objet dont il a l'usufruit.
(On trouvera d'autres articles mentionnant la jouissance ou le fait de jouir, dans le chapitre sur l'usufruit.)
Citation :
Article 817
Celui qui est en indivision pour la jouissance peut demander le partage de l'usufruit indivis par voie de cantonnement sur un bien ou, en cas d'impossibilité, par voie de licitation de l'usufruit. […]
Cet article serait absurde si usufruit et jouissance n'étaient pas synonymes.
En effet, le principe du partage de l'indivision est que celui est en indivision sur un droit peut demander le partage de
ce droit (et pas d'un autre droit).
Maintenant qu'il est acquis que le parent disposant de l'autorité parentale est usufruitier légal des biens de son enfant jusqu'à ses 16 ans, qu'en est-il quand le bien sont des liquidités ? Eh bien, on applique le 587.
Citation :
Article 587
Si l'usufruit comprend des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer, comme l'argent, les grains, les liqueurs, l'usufruitier a le droit de s'en servir, mais à la charge de rendre, à la fin de l'usufruit, soit des choses de même quantité et qualité soit leur valeur estimée à la date de la restitution.
Ce droit de s'en servir porte usuellement le nom de "quasi-usufruit". Donc le parent disposant de l'autorité parentale est quasi-usufruitier légal de l'argent de son enfant jusqu'à ses 16 ans, mais il a bien entendu obligation de restituer* les fonds dont il s'est servi à l'extinction de l'usufruit, donc aux 16 ans de l'enfant, voire plus tôt (386-2 plus haut) si son autorité parentale est retirée, ou si son administration légale ou simplement sa jouissance légale est supprimée par le juge.
* Il ne me semble pas possible de présumer à l'avance de la non-intention de restitution.
En particulier, cette jouissance légale pourrait être supprimée si le parent ne contribue pas aux charges telles que l'entretien et l'éducation de l'enfant (par exemple s'il cesse de payer sa pension alimentaire).
Citation :
Article 386-3
Les charges de cette jouissance sont :
1° Celles auxquelles sont tenus les usufruitiers ;
2° La nourriture, l'entretien et l'éducation de l'enfant, selon sa fortune ;
3° Les dettes grevant la succession recueillie par l'enfant en tant qu'elles auraient dû être acquittées sur les revenus.
Notons aussi :
Citation :
Article 387-1
L'administrateur légal ne peut, sans l'autorisation préalable du juge des tutelles :
[…]
8° Procéder à la réalisation d'un acte portant sur des valeurs mobilières ou instruments financiers au sens de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, si celui-ci engage le patrimoine du mineur pour le présent ou l'avenir par une modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives du mineur.
L'autorisation détermine les conditions de l'acte et, s'il y a lieu, le prix ou la mise à prix pour lequel l'acte est passé.
Les comptes bancaires et livrets ne sont pas considérés comme des valeurs mobilières et instruments financiers au sens de l'article du CMF. Donc les opérations sur ces produits ne requièrent pas l'autorisation du juge.
Après, hors juridique, il y a la morale. L'immense majorité des parents n'exercent pas leur droit légal de quasi-usufruit sur l'argent de leur enfant, et c'est heureux.