Quotité disponible-part réservataire

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Posté le Le 27/10/2024 à 15:53
Bonjour,
Nous sommes trois héritiers de mon père, dont deux réservataires : mon frère et moi-même, d'une 1ere union, notre belle -mère est la troisième.
Ils étaient mariés sous le régime de la séparation des biens.
Pas de testament. Pas d'enfants en commun. Pas de compte bancaire commun, pas de procuration.
Notre père pensait que ses biens propres avant mariage nous reviendraient. il avait fait donation de sa maison, où ils habitaient, à son épouse.
Cette dernière souhaite sa part sur les autres biens, et présente des estimations très basses de sa maison et très hautes des autres biens( estimations faites par des personnes de sa famille). Nous avons présenté des estimations d'autres agences, et sa maison (de bon standing) a plus de valeur que les autres biens (en mauvais état , mais biens de famille).
Comment se déterminent ses droits dans cette situation ?
Nous sommes perdus entre la quotité disponible et la part réservataire.
En tenant compte que la donation a été faite par "préciput et hors part ".
Merci

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Posté le Le 27/10/2024 à 16:57
Bonjour,
L'ensemble des biens de votre père décédé constitue la succession, ceci inclut aussi ses biens propres.
LE conjoint survivant en cas d'enfant(s) non commun(s) - ce qui est votre cas - reçoit 1/4 de la succession, sachant que la donation antérieure est rapportable.
Vous et votre frère recevez chacun 3/8.

Article 757
Modifié par Loi n°2001-1135 du 3 décembre 2001 - art. 1 () JORF 4 décembre 2001 en vigueur le 1er juillet 2002
Si l'époux prédécédé laisse des enfants ou descendants, le conjoint survivant recueille, () la propriété du quart en présence d'un ou plusieurs enfants qui ne sont pas issus des deux époux.


La valeur des biens immobiliers est couramment un sujet de litiges, aucune des estimations n'étant "meilleure" qu'une autre.
Si vous n'arrivez pas à vous accorder, il faudra saisir le tribunal.

Posté le Le 27/10/2024 à 17:16
Merci pour votre réponse.
Donc la donation sera prise en compte comme une avance sur le quart qui revient au conjoints ?
Le notaire nous a parlé de dépassement de quotité disponible mais ne nous en explique pas le principe, malgré nos demandes.
Notre belle mère souhaite 1/4 en plus de la donation car datant de plus de 15 ans et hors part, le notaire lui a expliqué que la donation serait prise en compte quand même.
Est-ce que cela signifie que la valeur de la donation viendra en soustraction du quart des biens restants ?

Merci

Posté le Le 27/10/2024 à 17:58
Bonjour,

Non cette donation n'est pas incluse dans le quart qui revient à la veuve puisqu'elle est faite "hors part". La veuve a droit à un quart des biens laissés par votre père en plus de sa donation.

Cependant la loi vous accorde une réserve héréditaire, ube part que vous avez le droit de revendiquer. Cette réserve est des deux tiers de la masse successorale (somme des donations faites par votre père de son vivant et des biens laissé à son décès).

Pour faire simple la veuve peut recevoir un quart des biens laissés par votre père en conservant sa donation dans la limite d'un tiers de la masse successorale.

Un exemple simplifié : mettons que la maison reçue en donation vale 100 000 euros. Mettons que votre père ait laissé par ailleurs 500 000 euros de biens. La masse successorale est donc de 600 000 euros. La réserve héréditaire qui est la part minimale revenant aux enfants est de 400 000 euros.

La veuve devrait recevoir 125 000 euros, soit le quart de sa part d'héritage, 1/4 des 500 000 euros. Cela laisserait 375 000 euros pour les enfants. 375 000 c'est moins que la réserve. La part de la veuve va donc être diminuée pour que les enfants aient leur réserve.

La veuve ne va donc recevoir que 100 000 euros en sus de sa donation.

__________________________
Modératrice

Posté le Le 27/10/2024 à 18:24
Je vous remercie pour vos explications très claires.

Posté le Le 28/10/2024 à 15:17
Bonjour.

Attention au fait que la masse de calcul des droits légaux d'un quart n'est pas la même que la masse de calcul de la quotité disponible. Et qu'il existe une masse d'exercice des droits légaux d'un quart.

Cependant, ici, en absence de testament ou de libéralité à cause de mort, si aucun tiers autre que le conjoint survivant n'a reçu une donation, et si aucun enfant n'a reçu une donation hors part, les deux masses devraient être égales.

Par ailleurs, la donation entre vif s'impute sur les droits légaux d'un quart. Si sa donation dépasse ses droits légaux, elle n'a pas de complément à recevoir. Sinon, elle peut recevoir un complément, et dans les deux cas, la réserve doit être respectée.

Ce serait bien d'avoir des valeurs (les vôtres, les siennes).

Posté le Le 28/10/2024 à 15:55
Bonjour,

Mon frère a également eu une donation (terres et bâtiments agricoles). Evalués par la SAFER à 100 000€.
Le reste des biens immobiliers (sans la maison d'habitation donnée) a été estimé à 250 000 € (moyenne de trois agences différentes).
Un expert que nous avons mandaté a évalué sa maison à 410 000€, le neveu de notre belle mère l'a estimé à 140 000€. Le neveu a estimé les autres biens à 417 000€.
Les liquidités restantes au décès 42000€.
Pour ma belle mère donation de la moitié de la maison par préciput , hors part (termes pris sur le contrat de mariage de séparation de biens) , elle a racheté la nue propriété de l l'autre moitié (50% à l'époque), elle est donc propriétaire.

Pour ma part je n'ai eu aucune donation (le droit d'aînesse est encore en vigueur dans ma famille et en plus je ne suis qu'une fille ). Mais je tiens à faire valoir mes droits selon les véritables lois.

Posté le Le 28/10/2024 à 16:23
Citation :
Le reste des biens immobiliers (sans la maison d'habitation donnée) a été estimé à 250 000 € (moyenne de trois agences différentes)

On ne prend 250000 que si votre père est le seul propriétaire de tous ces biens. Nous ne savons pas si vos parents ont divorcé ou si votre mère est décédée, mais dans ce dernier cas, pour un bien commun au couple de vos parents, vous en avez hérité pour partie, et ne dépend de la succession de votre père que la part dont il était propriétaire. Je précise cela pour éviter les erreurs de calcul.

En particulier pour la maison, doit-on comprendre que cette maison était commune au couple de vos parents, donc que vous en avez hérité d'une moitié en nue-propriété, votre père ayant donné sa moitié de maison, et vous avez vendu votre nue-propriété à la belle-mère ?

Comment a été faite la donation à votre frère ? Hors part ou en avance de part ? Faite par votre seul père ou par vos parents ? (en général, des terres ont une origine familiale, donc il y a des chances qu'elles étaient à votre seul père, mais il se peut aussi qu'elle aient été achetées par vos parents).
L'ordre des donations est important pour les imputations, entre celle faite à votre frère et celle faite à votre belle-mère.

Les liquidités sont propres à votre père si elles sont sur un compte personnel, en revanche, sur un compte-joint, sans preuve, elles sont réputées indivises pour moitié. Pour bien valoriser les liquidités.

Posté le Le 28/10/2024 à 16:40
Alors les biens étaient tous à mon père seul , avant son mariage avec notre belle mère.
Les comptes bancaires étaient au nom de mon père seul, pas de compte joint, pas de procuration.
Mes parents étaient divorcés et plus rien en commun.
La maison où habitaient mon père et ma belle mère était à mon père, il en fait donation pour la moitié en préciput hors part à son épouse en 2002, elle lui a acheté l’autre moitié en nue propriété en 2003 également.
Mon frère a eu la donation des terres et des bâtiments agricoles en avance de part en 2011.

Posté le Le 28/10/2024 à 17:43
Avec vos valeurs.

La donation à votre belle-mère étant importante, on peut vérifier en premier lieu la réserve.

Masse de calcul de la quotité disponible = biens présents au décès {250000 (immeubles) + 42000 (liquidités)} + donations {100000 (frère) + 205000 (belle-mère)} = 597000.
On va rajouter du mobilier 3000 pour arrondir à 600000.
Soit des biens présents au décès de 295000.

La quotité disponible totale de votre père est du tiers en présence de deux enfants, soit 200000.
La première donation 205000 à la belle-mère s'impute sur la QD 200000 qui est épuisée, l'excédent 5000 est sujet à réduction.
La belle-mère ne peut plus exercer des droits sur les biens présents.

En supposant un partage actuel (toutes les valeurs sont à réévaluer en cas de délai important pour procéder au partage, par exemple en cas de litige) :
Masse de partage entre vous et votre frère = biens présents au décès 295000 + donation rapportable 100000 (frère) + indemnité de réduction 5000 = 400000. Part de chacun 200000.

Votre frère ayant déjà reçu 100000, il lui reste donc à recevoir 100000, et vous 200000. Reste à faire le partage réel entre les biens présents au décès, et l'indemnité de réduction à recevoir.




Avec les valeurs du neveu.

Masse de calcul de la quotité disponible = biens présents au décès {417000 (immeubles) + 42000 (liquidités)} + donations {100000 (frère) + 70000 (belle-mère)} = 629000.
On va rajouter ici du mobilier 1000 pour arrondir à 630000.
Soit des biens présents au décès de 460000.

La quotité disponible totale de votre père est du tiers en présence de deux enfants, soit 210000.
La première donation 70000 à la belle-mère s'impute sur la QD 210000, il reste 140000 de QD.
Il est donc possible que la belle-mère puisse exercer des droits supplémentaires.

Masse de calcul des droits légaux d'un quart = biens présents au décès 460000 + donation rapportable 100000 (frère) + donation conjoint 70000 = 460000 (dans ce cas précis, c'est la même masse).
Droits légaux d'un quart de la conjointe survivante = 115000
La donation 70000 s'impute sur ces droits légaux, il lui reste donc 45000 à recevoir.

Ces droits ne peuvent s'exercer que sur les biens présents au décès, qui sont suffisants pour les servir. Les 115000 servis ne préjudicient pas à la réserve.

Masse de partage entre vous et votre frère = biens présents au décès 460000 + donation rapportable 100000 (frère) - reste des droits de la conjointe survivante 45000 = 515000. Part de chacun 257500.

Votre frère ayant déjà reçu 100000, il lui reste donc à recevoir 157500, et vous 257500. Reste à faire le partage réel entre les biens présents au décès, en tenant compte du reste à recevoir de la conjointe survivante.

Posté le Le 29/10/2024 à 07:14
Je rajoute des explications sur la masse de calcul des droits légaux du conjoint survivant. Elle résulte de :

Citation :
Article 758-5
Le calcul du droit en toute propriété du conjoint prévu aux articles 757 et 757-1 sera opéré sur une masse faite de tous les biens existant au décès de son époux auxquels seront réunis fictivement ceux dont il aurait disposé, soit par acte entre vifs, soit par acte testamentaire, au profit de successibles, sans dispense de rapport.
Le conjoint ne pourra exercer son droit que sur les biens dont le prédécédé n'aura disposé ni par acte entre vifs, ni par acte testamentaire, et sans préjudicier aux droits de réserve ni aux droits de retour.

Fin de citation

La difficulté d'application de cet article concerne les donations entre vifs faites au conjoint survivant, puisque le conjoint survivant étant un héritier spécial, il ne participe pas au partage à égalité sur la masse de partage incluant les rapports. Et que les donations au conjoint survivant sont prises sur la quotité disponible, donc non rapportables. Bref cette donation s'intègre telle à la masse de calcul ? La réponse semble venir du 758-6, qui dit que les libéralités, donc la donation entre vifs, s'impute sur les droits légaux. Pour l'imputer, il faut donc que la donation entre vifs soit dans la masse de calcul des droits légaux.

Un gros livre récent sur les successions en ma possession précise :

Citation :
Composition de la masse de calcul :
– les biens existant desquels on déduit les legs (sauf legs expressément rapportables ; il est ici rappelé que le legs est préciputaire en l’absence de disposition contraire) ;
– les donations en avancement de part successorale (consentie à un héritier acceptant y compris celles faites au conjoint lui-même*, mais également les testaments avec disposition expresse de rapport, dits « legs d’attribution ».
* Il s’agirait de toutes les donations consenties au conjoint qu’elles soient en avancement de part ou hors part successorale, c’est-à-dire rapportables ou non rapportables : P. CATALA, « Successions. – Conjoint successible. – Nature. Montant. Exercice », Jurisclasseur, Fasc. 10, janv. 2007, no 78 ; B. BEIGNIER, « Successions et libéralités – Le conjoint – », Lamy, étude 232, no27 ; Cass.civ., 8 févr. 1898, D. 1899. I. 153.

L'astérisque (on notera le conditionnel) provient à mon avis du fait de l'imputation ultérieure des libéralités sur les droits légaux.

Posté le Le 29/10/2024 à 07:51
Je vous remercie pour vos réponses qui aident à comprendre le mécanisme assez compliqué des successions.

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