Leg particulier et renonciation au profit des enfants

> Famille > Succession

Posté le Le 08/01/2025 à 15:50
Bonjour,

J'ai besoin de comprendre ce que devient un leg particulier en cas de renonciation au profit des enfants.

Une personne décède et laisse un testament. Cette personne n'a pas d'enfants.

En synthèse le testament dit :
-je lègue l'ensemble de mes biens à parts égales à mes deux frères, André et Jean. (il n'y a pas d'autre frères / sœurs)
-"Je souhaite que dans le partage de ma succession, mes parts de la société familiale reviennent à mon frère Jean dans sa part de la moitié de la succession qui lui revient". (ceci est la formulation exacte du testament)

Les deux frères renoncent au legs et à l'heritage au profit de leurs enfants. Les enfants viennent donc en representation de leurs parents respectifs. Mais que deviennent alors les parts de la société familiale? Comment sont-elles réparties dans l'heritage?

Merci pour votre aide.

Poser une question Ajouter un message - répondre
Posté le Le 08/01/2025 à 16:34
Bonjour.

On ne renonce pas au profit de quelqu'un. On renonce tout court, et à qui la succession échoit ensuite est défini par la loi. Renoncer au profit de quelqu'un est regardé comme une acceptation suivie d'une donation.

Sur le formulaire Cerfa de renonciation :
- il n'y a pas de désignation de personnes à qui cela va profiter ;
- il y a deux cases à cocher : la renonciation à l'héritage, et la renonciation au testament (on peut renoncer à un héritage et accepter un testament, et vice versa, ou renoncer aux deux).

Donc si les frères renoncent au legs universel "au profit de" leurs enfants respectifs, ils vont payer des droits de succession sur leur moitié de legs universel, et leurs enfants vont ensuite payer des droits de donation sur leur moitié donnée.

La première disposition est un legs universel aux frères.
La seconde disposition n'est pas un legs particulier, c'est ce qu'on appelle un "legs d'attribution", qui décrit en fait une contrainte sur la répartition des biens entre les deux légataires universels. C'est une modalité de partage des biens légués (testament-partage). Le texte est très bien écrit à cet égard.

On pourrait toutefois considérer que cette modalité de partage concerne aussi l'héritage légal, en cas de renonciation au legs.

Si les frères renoncent (tout court) au legs testamentaire, le testament est ignoré, car il n'y a pas représentation dans les dispositions testamentaires. Les biens légués retombent dans la succession. Les héritiers sont les deux frères (on suppose qu'il n'y a pas de conjoint survivant ni les père et mère du défunt). Ils doivent alors ensuite renoncer aussi à leur vocation d'héritiers légaux, ce qui semble avoir été fait. Pareillement, on ne renonce pas à ses droits d'héritier "au profit" de quelqu'un.

Comme la représentation existe dans les branches collatérales des frères et soeurs, les héritiers deviennent les représentants des renonçants, soit leurs enfants respectifs, chaque groupe d'enfants recevant une moitié.*

A priori, les modalités de partage de l'héritage légal entre les deux héritiers ne se transmettent pas à leurs représentants, car la 2nde disposition testamentaire implique que le frère accepte sa part, et donc sa composition.

Et de toute façon, la formulation "je souhaite" n'impose rien, ce n'est pas une volonté, mais un souhait. Tu souhaites, mais nous, on ne veut pas.

Posté le Le 08/01/2025 à 23:42
Un grand merci Rambotte pour cette reponse. N'étant pas moi même juriste il me faut parfois un peu de temps pour digérer un texte juridique et être sûr de bien le comprendre. J'étais dans cette phase de digestion et je commençais à bien mesurer vos propos quand au détour d'un rafraichissement de ma page internet j'ai vu que vous aviez un peu modifié / réorganisé votre réponse dans le sens d'apporter plus de précisions. Et votre réponse est très claire.

Citation :
On ne renonce pas au profit de quelqu'un. On renonce tout court, et à qui la succession échoit ensuite est défini par la loi. Renoncer au profit de quelqu'un est regardé comme une acceptation suivie d'une donation

Je comprends, je pense que j'ai fait un abus de langage suite à la lecture de cet article : https://www.lerevenu.com/preparer-succession/donations/succession-passer-son-tour-au-profit-dun-enfant/

Citation :
Sur le formulaire Cerfa de renonciation :
- il n'y a pas de désignation de personnes à qui cela va profiter ;
- il y a deux cases à cocher : la renonciation à l'héritage, et la renonciation au testament (on peut renoncer à un héritage et accepter un testament, et vice versa, ou renoncer aux deux).

C'est ce qui a été fait, renonciation au testament et à l'heritage. D'ailleurs le tribunal a refusé que les deux cases soient cochées sur le même formulaire. Ils ont demandé à ce qu'il y ait 2 formulaires, une seule case cochée par formulaire.

Citation :
On pourrait toutefois considérer que cette modalité de partage concerne aussi l'héritage légal, en cas de renonciation au legs.

J'ai un peu de mal à mesurer vos propos. Cette considération serait-elle au gré des héritiers (les enfants)?

Bon maintenant il me reste à faire entendre tout cela au clair de notaire. Il considère que la deuxième disposition est un leg particulier et que la renonciation testamentaire ne vaut pas pour un leg particulier. Il compte donc donner les parts de la société aux heritiers de Jean et partager en deux le reste des biens. Dans ce cas le partage n'est plus à parts égales.

Posté le Le 09/01/2025 à 08:08
Citation :
D'ailleurs le tribunal a refusé que les deux cases soient cochées sur le même formulaire.

Normalement, on devrait pouvoir, puisque les deux ne sont pas contradictoires.
Mais c'est vrai que dans le formulaire, il est écrit "la" case correspondant à la situation. Il me semble que dans une ancienne version du formulaire, on pouvait cocher les deux.

Si on lit bien le texte de la seconde disposition, on se rend compte qu'elle est indépendante de la qualité de légataire ou d'héritier.

Si les deux légataires universels acceptent leur legs, ils doivent procéder au partage des biens en deux moitiés. La disposition dit explicitement que dans le lot composant la moitié pour Jean, les parts de société doivent être incluses.

Si les deux légataires renoncent et se contentent d'être les deux héritiers*, ils doivent procéder au partage des biens en deux moitiés. La disposition dit explicitement que dans le lot composant la moitié pour Jean, les parts de société doivent être incluses.

* Pouvez-vous confirmer que le défunt n'avait pas de conjoint survivant, et n'avait ni son père ni sa mère encore vivant, ni d'ailleurs de descendance d'un autre frère/sœur prédécédé ?

Si les deux héritiers renoncent, leurs descendances respectives les représentent, et on voit que la disposition devient a priori caduque en première lecture , puisque Jean ne participe plus au partage et n'a plus de lot à composer.

Si dans la disposition, il était écrit "Jean ou ses représentants", il n'y aurait pas de doute que dans le lot composant la moitié pour les enfants de Jean, les parts de société devraient y être incluse.

Il pourrait y avoir une action* en interprétation du testament pour savoir si la volonté du testateur était que les parts de société soient attribuées dans le partage aux enfants de Jean s'il renonçait. Il faudrait sans doute présenter des éléments extrinsèques au testament pour accréditer cette volonté.
* Ou alors une convention amiable d'interprétation, sans passer par le tribunal.

Citation :
Il considère que la deuxième disposition est un leg particulier et que la renonciation testamentaire ne vaut pas pour un leg particulier. Il compte donc donner les parts de la société aux héritiers de Jean et partager en deux le reste des biens.

Mais dans tous les cas, il est certain que ce n'est pas un surplus par rapport à la moitié, ni pour Jean, ni pour ses représentants. Le texte de la disposition est limpide : "mes parts […] reviennent à […] Jean dans sa […] moitié […] qui lui revient" : aucune notion de surplus, c'est simplement que dans la moitié qui reviendra à Jean, il devra y avoir les parts de société. La phrase est tellement claire qu'il est impossible d'en tordre le sens.

Et bien sûr que l'on peut renoncer à un legs particulier. Mais ici ce n'en est pas un. C'est une disposition de partage, cette disposition vaut testament-partage (partiel, puisque tout n'est pas attribué).

Posté le Le 09/01/2025 à 11:04
Merci pour votre réponse très claire. C'est le fait que le partage ne soit plus à parts égales qui nous a fait réagir (vous l'aurez compris, je suis sur la branche André).

La personne décédée n'avait pas de conjoint survivant, et n'avait ni son père ni sa mère encore vivant. Elle avait une sœur prédécédée antérieurement au testament et elle aussi sans descendance.

Ayant retranscrit vos explications au clerc de notaire hier soir par email, il a appelé le Cridon et nous dit ce matin que du fait des renonciations aux legs les parts de la société retombe dans l'escarcelle commune et que l'ensemble du patrimoine sera partagé en deux à parts égales. Un changement radical de position. Merci donc pour vos explications qui ont permises de mettre un doute suffisant du coté du notaire pour que la situation change. La position actuelle du clerc de notaire semble acceptable et acceptée par l'ensemble des héritiers, nous en resterons donc là sur ce sujet.

Par contre nous apprenons aussi ce matin qu'il y a un codicille et dans ce codicille on y trouve :
"A charge pour mes légataires universels de délivrer les legs particuliers suivants :
-X euros à l'association AAA
-Y euros à l'association BBB
-Z euros à l'association CCC"
La question est, dans la situation telle qu'elle est, qu'advient-il de ces legs particuliers? Sont-ils exécutés par le notaire ou par les héritiers?

Posté le Le 15/01/2025 à 11:35
Bonjour,
il n'y a pas eu de réponse à mon dernier message et à ma question à la fin du message. Alors je tente un petit up. Merci d'avance

Posté le Le 15/01/2025 à 12:14
Suite à renonciation, il n'y a plus de légataires universels. Il n'y a que des héritiers. Ce sont les héritiers qui délivrent les legs aux légataires particuliers, lorsqu'il demandent la délivrance de leurs legs.

Il me semble que dans la pratique, si le notaire est en possession des sommes, il peut délivrer au nom des héritiers.

Les legs particuliers de montants en euros ne sont possibles que si les sommes d'argent sont présentes dans la succession. Des actions, des obligations, des parts de société, ne sont pas des euros.

Posté le Le 15/01/2025 à 17:09
Merci, encore une réponse très claire. Si le notaire pouvait être aussi compétent que vous...

Ajouter un message - répondre

PAGE : [ 1 ]


pub devis