Citation :
Plusieurs sites d'avocats ne disent pas la même chose, alors que penser ?
Comme plusieurs sites d’avocat ne disent pas la même chose, j’en conclus que ce n’est pas simple et qu’il ne faut pas s’en tenir à des idées reçues.
D’abord il faut lire ce que disent ces avocats sur leurs sites. Tous les sites ne se valent pas. Certains sont meilleurs que d’autres. Ce qu’on peut lire sur certains est très contestable. On peut même relever parfois de la malhonnêteté intellectuelle.
Sur un site donné, il faut tout lire. Souvent après un titre accrocheur simple et péremptoire, le développement qui suit est beaucoup plus nuancé.
Prenons le site de l’avocat Rigal-Meyer :
https://www.avocat-rigal-meyer.fr/quelle-offre-d-achat-du-bien-immobilier-est-prioritaire-en-cas-de-pluralite--_ad91.html
Citation :
Dans ces conditions, une offre est réputée parfaite - et donc irrévocable pour le vendeur à moins qu’il n’engage sa responsabilité extracontractuelle - dès lors que les parties ont convenu de l’objet et du prix de vente.
La jurisprudence est constante à ce titre :
« L’offre d’achat est ferme, et donc sans condition, lorsqu’elle exprime la volonté de son auteur de s’engager sur la chose et sur le prix déterminés par l’offre de vente, de sorte que la vente est parfaite ; Le caractère ferme de l’offre d’achat n’est pas remis en cause lorsque celle-ci comporte des précisions sur l’état de l’immeuble vendu, dès lors que ces précisions ne sont pas une condition de l’engagement de l’acquéreur » (Cass. 3ème ch. Civ. 29 janvier 2013).
Allons chercher cet arrêt. Il porte le numéro 11-27.425.
Nous découvrons d’abord que la citation
L’offre d’achat est ferme … n’est pas tirée du corps de l’arrêt mais d’un moyen de cassation qui y est annexé et que ce moyen a été déclaré par la cour comme n’étant pas de nature à permettre l'admission de ce pourvoi.
On peut légitimement s’attendre à ce que cet arrêt mentionné à l’appui de la théorie défendue porte sur les prétentions d’un acheteur dont l’offre a été repoussée. Pas du tout ! Il porte sur le refus d’une cour d’appel d’accorder des dommages et intérêts.
Citation :
Il est constant que l’acceptation sans réserve d’une offre non révoquée ni caduque forme le contrat.
Et quand on lit l’arrêt du 27 juin 2019 n° 15-18.863 ignoré par Me Rigal-Meyer on constate que ce n’est pas si simple. Avant de partir bille en tête sur la notion d’offre non révoquée ni caduque, il faut d’abord s’interroger sur le caractère de cette offre : offre d’achat ou simplement offre d’entrer en pourparlers sur la base d’une proposition de prix ? Me Rigal-Meyer n’en dit pas un mot. Dans l’arrêt que j’ai commenté, le juge du fond a constaté qu’il n’y avait qu’une offre d’entrer en pourparlers.
On peut certes trouver d’autre arrêts :
Arrêt du 28 novembre 1968 : cela date de cinquante ans, de l’eau a passé sous les ponts.
Arrêt du 1er juillet 1998, n° 96-20.605. Il remonte tout de même à plus de vingt ans et depuis les vingt dernières années, il y a d’autres jurisprudences qui ne vont pas du tout dans le même sens. L’auteur du site n’en dit rien. Ce n’est pas honnête.
Le site de Me Barbigant est beaucoup plus complet et honnête. Il se décompose en deux parties : d’abord l’application stricte du code civil dans son esprit initial, ensuite les exceptions et la tendance jurisprudentielle. Si on le lit du début à la fin, on a une vue saine de la question.
Plusieurs explications peuvent être données à la contradiction qui apparaît entre l’arrêt du 1er juillet 1998 et celui du 27 juin 2019 :
- l’évolution de la jurisprudence en vingt ans,
- des circonstances très différentes appréciées différemment par le juge du fond,
- l’introduction en 2001 du droit de rétractation de l’acheteur plus enclin qu’auparavant à signer n’importe quoi sans aucun risque,
- l'introduction de l'obligation à fournir une batterie de diagnostics rendant les ventes immobilières de plus en plus complexes,
- l’introduction en 2016 dans le code civil de la notion de phase précontractuelle.