Cher monsieur,
Citation :
L'abrogation d'un décret rend-elle juridiquement illégales les mesures règlementaires qui avaient été fixées en leur temps par arrêté ministériel ?
La question se pose lorsqu'un nouveau décret, remplaçant le précédent qui a été abrogé, prévoit un arrêté qui n'est jamais pris.Dans ce cas, y a-t-il vide juridique où est-il fondé de se référer aux règles fixées par l'arrêté pris en application du décret précédent ?
L'arrêté du 30 mai 62 fixait les règles d'exercice de l'activité d'expert des praticiens prévue dans le décret statutaires 61-946 du 24 août 1961. Ce décret statutaire a été abrogé par l’article 96 du décret 78-257 du 8 mars 1978 portant statut des praticiens à plein temps. Ce décret et les décrets statutaires ultérieurs prévoyaient tous des arrêtés pour fixer les conditions de réalisation des expertises, arrêtés qui n'ont jamais été pris.
Dès lors les règles fixées par le premier arrêté sont elles opposables, alors même que les décrets successifs ont modifié le cadre global d'exercice ou s'agit-il d'un vide juridique ?
A titre préliminaire, il convient de préciser qu'il existe deux formes d'abrogation:
-Il y a abrogation expresse lorsque le législateur prend soin, dans une disposition formelle, de priver de sa force obligatoire telle ou telle disposition législative antérieure. L'abrogation est alors pure et simple. Le plus souvent, elle est jointe à une réglementation nouvelle qui se substitue à la réglementation abrogée
Une variante de l' abrogation expresse consiste à déclarer que tel texte antérieur « est ainsi rédigé », ou « est ainsi modifié » ou encore « est remplacé par » (V., par ex., art. 1er, Ord. no 2004-164 du 20 févr. 2004, JO 21 févr. relative aux modalités et effets de la publication des lois et de certains actes administratifs : « L'article 1er du code civil est remplacé par les dispositions suivantes »).
-L'abrogation tacite (ou implicite) résulte, en dehors de toute déclaration formelle, de l'incompatibilité logique de la disposition nouvelle avec l'ancienne. Comme les deux dispositions ne peuvent être dans le même temps appliquées, il faut bien en conclure, si l'on ne veut pas prêter au législateur une contradiction, qu'il a entendu abroger la disposition ancienne (Cass. soc. 4 mars 1987, Bull. civ. V, no 104 ; Cass. crim. 21 mai 1992, Bull. crim., no 203).
Ainsi donc, il existe plusieurs façons de revendiquer la nullité de cet arrêté:
-Soit cet arrêté a fait l'objet d'une abrogation expresse, ce qui ne semble néanmoins pas être le cas, alors dans ce cas, l'arrêté est abrogé.
-Soit l'arrêté, n'a pas été abrogé, mais est contredit par un nouvel arrêté: Là encore, cela ne semble pas être le cas.
-Soit l'arrêté entre en contradiction avec des éléments du nouveau décret: Dans ce cas, l'arrêté est privé de base légale pour motif de contradiction avec un texte supérieur: Il est donc réputé nul uniquement pour les articles qui viennent en contradiction avec le décret.
Si ce dernier élément n'est pas rempli, alors l'arrêté a effectivement en principe vocation à demeurer.
Très cordialement.