Posté le Le 04/07/2024 à 13:29
Bonjour,
Je vient vers vous concernant une requête sur mes droits suite la cession du fond de commerce de mon employeur.
En effet, nous avons reçu une lettre d'information du personnel le 27/06/24 nous demandant si oui ou non, nous souhaitons faire une offre de rachat.
Cependant, celui ci aurais déjà céder le fond de commerce a une autre société tiers avec l’intégralité de nos contrat, et nous sommes censé commencer a travailler pour cette nouvelle entreprise le 16/08/24.
Mes questions sont :
- Mon employeur a t'il le droit d'avoir signer la vente du fond de commerce, avant même de nous avoir laisser les 2 mois légal pour que nous, salariées, faisions une offre ?
- Quels sont les recourt possible a entreprendre car nos droits n'ont pas été respecter ?
- Comment obtenir la preuve écrite que la vente a un tier a bien été réalisé avant notre droit de proposition de rachat?
- Si nous commençons a travailler pour la société qui rachète avant le 27/08/2024,soit 2 mois après la réception de la proposition de rachat aux salariés, pouvons nous obtenir gain de cause au tribunal ?
Merci d'avance pour vos futurs retours.
Posté le Le 04/07/2024 à 17:55
Madame, Monsieur,
En faits, le propriétaire du fonds de commerce a manifesté sa volonté de le céder à un tiers et a, par lettre du 27 juin 2024, informé les salariés de ses intentions afin que vous puissiez formuler une offre de reprise.
I. Sur le droit à l'information des salariés en cas de cession du fonds de commerce.
En droit, l'article L.141-23 du Code de commerce prévoit que :
Dans les entreprises qui n'ont pas l'obligation de mettre en place un comité d'entreprise en application de l'article L. 2322-1 du code du travail, lorsque le propriétaire d'un fonds de commerce veut le vendre, les salariés en sont informés, et ce au plus tard deux mois avant la vente, afin de permettre à un ou plusieurs salariés de l'entreprise de présenter une offre pour l'acquisition du fonds.
Lorsque le propriétaire du fonds n'en est pas l'exploitant, cette information est notifiée à l'exploitant du fonds et le délai court à compter de la date de cette notification. L'exploitant du fonds porte sans délai à la connaissance des salariés cette notification, en les informant qu'ils peuvent lui présenter une offre d'achat.
L'exploitant notifie sans délai au propriétaire toute offre d'achat présentée par un salarié.
Lorsque le fonds est exploité par son propriétaire, celui-ci notifie sa volonté de vendre directement aux salariés en les informant qu'ils peuvent lui présenter une offre d'achat, et le délai court à compter de la date de cette notification.
La vente peut intervenir avant l'expiration du délai de deux mois dès lors que chaque salarié a fait connaître sa décision de ne pas présenter d'offre.
Lorsqu'une action en responsabilité est engagée, la juridiction saisie peut, à la demande du ministère public, prononcer une amende civile dont le montant ne peut excéder 2 % du montant de la vente.
(Article L.141-23 du Code de commerce)
En d'autres termes, dans les sociétés concernées, le propriétaire du fonds de commerce doit, dans les deux mois précédant la vente, signifier le projet de cession aux salariés affectés à l'exploitation de ce fonds.
Pour les sociétés comportant un C.S.E, l'information aux salariés doit intervenir sans délai après que le comité a été informé (article L.141-28 du Code de commerce).
Une telle information n'est pas obligatoire dans trois situations:
1° En cas de vente du fonds à un conjoint, à un ascendant ou à un descendant ;
2° Aux entreprises faisant l'objet d'une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires régie par le livre VI ;
3° Si, au cours des douze mois qui précèdent la vente, celle-ci a déjà fait l'objet d'une information en application de l'article 18 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire.
(Article L.141-32 du Code de commerce)
Toutefois, il ne s'agit ni d'un droit de préemption, ni une priorité accordée aux salariés.
En effet, le propriétaire du fonds n'est pas tenu, en vertu du principe de liberté contractuelle, d'accepter l'offre faite par l'un ou plusieurs de ses salariés.
Toutefois, l'absence d'information visée par le texte - lorsqu'elle est établie - est sanctionnée par une amende civile allant jusqu'à 2% de la transaction.
Le texte ne prévoit donc pas la nullité de la cession, même en cas d'absence d'information.
En l'espèce, il n'est pas précisé si le fonds est exploité par le propriétaire ou par un tiers, ce qui a des incidences sur le point de départ des deux mois.
Si le propriétaire n'exploite pas le fonds, le délai ne court dès la notification du propriétaire à l'exploitant.
Néanmoins, cette notification doit avoir été réalisées dans les formes prévues par le règlement.
II. Sur la forme de la notification.
L'article D.141-4 du Code de commerce énonce que:
L'information des salariés mentionnée aux articles L. 141-25 et L. 141-30 peut être effectuée selon les modalités suivantes :
1° Au cours d'une réunion d'information des salariés à l'issue de laquelle ces derniers signent le registre de présence à cette réunion ;
2° Par un affichage. La date de réception de l'information est celle apposée par le salarié sur un registre accompagnée de sa signature attestant qu'il a pris connaissance de cet affichage ;
3° Par courrier électronique, à la condition que la date de réception puisse être certifiée ;
4° Par remise en main propre, contre émargement ou récépissé, d'un document écrit mentionnant les informations requises ;
5° Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;
6° Par acte extrajudiciaire ;
7° Par tout autre moyen de nature à rendre certaine la date de réception.
(Article D.141-4 du Code de commerce)
La notification, de quelque forme qu'elle prenne, doit pouvoir contenir une date certaine.
En l'espèce, vous évoquez une lettre d'information du personnel sans toutefois préciser le procédé par lequel la date pourrait être certaine, au sens du texte.
Pour la prise en compte de ce délai, il est nécessaire - outre la question de l'éventuelle notification à l'exploitant - de connaître la date certaine de ladite notification, c'est-à-dire celle que ne pourra pas contester le propriétaire du fonds, à supposer qu'il l'exploite lui-même ou, à défaut, l'exploitant.
III. Réponse à vos questions.
a. Sur la vente conclue avant terme.
Au vu de ce qui précède, la vente ne peut - si le délai de deux mois suivant notification aux salariés n'est pas purgé - céder le fonds à un tiers.
Toutefois, aucune sanction - outre l'amende civile qui n'est pas systématiquement prononcée et ne peut dépasser 2% de l'opération - n'est prévue quant à la validité-même de l'acte.
En effet, depuis une loi du 06 août 2015, la cession n'encourt plus la nullité, même conclue en violation du délai d'information aux salariés.
Par conséquent, l'action en responsabilité pourra viser, à condition que les critères textuels soient réunis, à obtenir la condamnation du cédant à une amende civile et non à remettre en cause la validité de la cession.
Néanmoins, je vous indique qu'une double condition s'applique pour que l'amende puisse être prononcée:
1. D'une part, qu'un ou plusieurs salariés agissent en responsabilité.
2. D'autre part, que le Ministère public en fasse lui-même la demande.
Autrement dit, cette amende n'est que très rarement prononcée.
b. Sur l'action à mener.
A supposer que les conditions de faits et de droit soient réunies, il conviendra d'agir en responsabilité devant le Tribunal de commerce situé dans le ressort du lieu ayant pour siège le fonds de commerce.
c. Sur la preuve de la cession.
La cession d'un fonds de commerce est soumise à des formalités de publication.
L'article L.141-12 du Code de commerce prévoit que:
Sous réserve des dispositions relatives à l'apport en société des fonds de commerce prévues aux articles L. 141-21 et L. 141-22, toute vente ou cession de fonds de commerce, consentie même sous condition ou sous la forme d'un autre contrat, ainsi que toute attribution de fonds de commerce par partage ou licitation, est, sauf si elle intervient en application de l'article L. 642-5, dans la quinzaine de sa date, publiée à la diligence de l'acquéreur sur un support habilité à recevoir des annonces légales dans le département dans lequel le fonds est exploité et sous forme d'extrait ou d'avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. En ce qui concerne les fonds forains, le lieu d'exploitation est celui où le vendeur est inscrit au registre du commerce et des sociétés.
(Article L.141-12 du Code de commerce)
Par conséquent, vous pourrez aisément avoir la preuve de la date de la cession, via la consultation de la publication.
d. Sur les effets de la cession quant aux contrats de travail.
Le projet de cession du fonds de commerce prévoit la reprise des contrats de travail.
Par conséquent, l'exécution desdits contrats de travail est, à mon sens, sans effet sur la cession du fonds de commerce.
Néanmoins, il conviendra de faire parvenir l'ensemble de vos questions à votre Conseil habituel qui pourra apprécier la situation de faits, et donc de droit, attachée à votre exposé.
Je ne peux que vous conseiller de le saisir de vos questions.
Telles sont les réponses que vos questions appellent de ma part.
Bien à vous.
A.BALDE.