Bonjour à tous,
Je suis confronté à une problématique concernant le maintien de salaire pour un arrêt de travail pour Covid. J’espère pouvoir trouver ici de l’aide.
J’ai attrapé (ainsi que ma conjointe) le COVID le mois dernier. Nous étions symptomatiques : fièvre, toux, maux de têtes, frissons, insomnies etc. Nous avons donc été arrêtés (suite à nos tests covid positif). Nous avons tous les deux moins d’un an d’ancienneté dans nos entreprises respectives, ce qui ne nous donne en principe pas le droit à un maintien de salaire en complément de l’indemnité de la sécurité sociale. Cependant, sur l’arrêt de travail, figure cette mention :
Citation :
Cette attestation est délivrée dans le cadre des arrêts dérogatoires liés à la Covid-19. L’Assurance Maladie indemnise l’arrêt à compter du premier jour déclaré sur l’attestation d’isolement et dans les conditions habituelles de calcul du montant des Indemnités journalières.
Pour les arrêts débutant à compter du 10 Janvier 2021, le dispositif prévoit que la prise en charge du complément de salaire, en lien avec l’indemnisation de l’Assurance Maladie et pour la période d’arrêt, soit intégralement à la charge de l’employeur.
En me renseignant auprès de la sécurité sociale (Amélie), on me confirme alors que, pour les arrêts maladies concernant le COVID, l’employeur est tenu de verser un maintien de salaire, sans jour de carence, et sans conditions d’ancienneté. Je demande donc confirmation de la prise en compte de cette règle en ce qui me concerne. Les RHs transmettent la demande au service juridique, qui m’a indiqué que ce maintien de salaire ne serait pas versé (et je ne l’ai effectivement pas reçu sur ma fiche de paie nie sur mon compte, ce qui représente une différence de plus de 500 euros par rapport à ce que je touche habituellement (après prise en compte des indemnités versées directement par la CPAM). Ma conjointe a, elle, reçu un complément de salaire sans avoir même à en faire la demande, alors qu’elle n’a pas non plus l’année d’ancienneté demandée par sa convention collective pour les arrêts maladies dans le cas général (hors covid).
Voici le mail que j’envoie à mon service RH pour réclamer :
Citation :
[...]
Concernant la légalité de ce maintien de salaire : comme je vous l’ai dit plus tôt, il m’a été confirmé par la sécurité sociale (il figure même clairement sur l’arrêt de travail que j’ai fourni). Cela repose notamment sur les articles suivants :
Article L16-10-1 du code de la sécurité sociale, qui prévoit en cas de crise sanitaire la possibilité d’adopter par décret des améliorations des prises en charge des frais de santé
Décret 2021-13 qui prévoit ledit maintien de salaire (d’où sa mention sur l’arrêt de travail), sans délai de carence, sans condition d’ancienneté, à la charge de l’employeur.
La loi 2021-1754 de financement de la sécurité sociale pour 2022, et son article 93, qui prolonge l’application du décret ci-dessus (d’où, une nouvelle fois, la mention sur l’arrêt de travail)
[...]
Et voici la réponse que j’ai reçu (écrite par les juristes et transmise par les RH) et qui semble justifier le refus du maintien de salaire.
Citation :
L’indemnisation complémentaire de l’employeur en cas d’arrêt maladie covid (ou non covid d’ailleurs) est fixé :
Soit par la loi
Soit par la convention collective
Il convient d’appliquer le régime le plus favorable pour l’ensemble des salariés. Il s’agit d’une appréciation globale et non d’une appréciation salarié par salarié, qui est pratiquée avantage par avantage.
C’est un principe très clairement affirmé par la Cour de cassation, de longue date.
En l’occurrence, le régime du maintien de salaire a été assoupli pour les arrêts covid : dans la loi, il n’y a plus de condition d’ancienneté ni de délai de carence. L’indemnité est de 90% du salaire brut pendant 30 jours, puis 66% pendant 30 jours.
Il convient de le comparer au régime de notre convention collective : condition d’ancienneté d’1 an, pas de délai de carence. L’indemnité est de 100% du salaire net pendant 45 jours, puis 75% pendant 30 jours.
Au vu de l’ancienneté moyenne des collaborateurs (+ d’1 an d’ancienneté), le régime conventionnel d’indemnisation de la maladie est donc globalement plus favorable pour l’ensemble des salariés (que l’on parle du pourcentage d’indemnisation, de la base du salaire maintenu, ou de la durée d’indemnisation).
Il n’y a donc pas lieu d’appliquer le régime légal d’indemnisation complémentaire en cas de maladie (que ce soit pour un arrêt covid ou pas). Il n’y a donc pas de complément de salaire à assurer pour les salariés ayant moins d’1 an d’ancienneté.
Donc pour résumer, ils précisent que selon une décision de la Cour de cassation (laquelle ? ils ne le précisent pas), la loi s’appliquerait de façon collective au niveau de tous les salariés de la boite (cela me semble fou, mais je ne suis pas juriste). Dans mon cas (moins d’un an d’ancienneté), la convention collective n’accord aucun maintien de salaire (la loi sur les arrêts du covid est donc plus favorable pour mon cas individuel), mais comme une majorité de collaborateurs ont plus d‘un an d’ancienneté, la convention collective est plus avantageuse pour cette majorité de collaborateur, et c'est donc elle qui est appliquée : obligeant donc les autres collaborateurs à bénéficier de prestations moins avantageuses que la loi. Ils ne prennent de plus pas la peine de préciser le nombre d’employés ayant moins d’un an et plus d’un an d’ancienneté... la boite embauche massivement et je ne serais pas étonné qu’on soit proche de la limite des 50%, peut-être même donc au-dessus, c’est en tout cas la tendance que je constate dans mes locaux, mais je n’ai pas les chiffres officiels à l’échelle de la boite.
De plus, pour déterminer si la loi ou la convention est plus avantageuse, ils se basent sur une indemnité à 90% dans le cas du covid (sans citer leur sources). Les textes que j’ai trouvés (voir mon premier mail) parlent d’un maintien de salaire sans préciser un taux de 90%, je comprenais donc que le maintien était bien de 100%. Cela rendrait alors même discutable le fait que la convention collective soit plus avantageuse pour la majorité des salariés car on aurait alors 100% avec l’une comme avec l’autre (au lieu de l’absence de maintien de salaire, et donc 50% du salaire via la CPAM, pour toutes les personnes ayant moins d’un an d’ancienneté).
Enfin, en admettant même que le chiffre de 90% de maintien via la loi soit en fait correct, ainsi que tous leurs arguments et toutes leurs hypothèses, j’ai malgré tout du mal à comprendre leur raisonnement. La décision (non sourcée, donc je n’ai pas le texte pour me faire mon idée) de la Cour de cassation indique apparemment qu’« Il convient d’appliquer le régime le plus favorable pour l’ensemble des salariés ». Le calcul qu’ils font ne correspond pas à chercher le régime le plus favorable pour l'ensemble des salariés, mais à déterminer le régime le plus favorable pour la majorité des salariés. Si on fait donc le calcul pour l’ensemble (ce qui à mon sens est une moyenne pondérée par les effectifs, comme le ferait n’importe quel mathématicien) le résultat dépend alors du nombre de salariés de moins d’un an d’ancienneté. La loi ne mettant pas de condition d’ancienneté, l’indemnisation moyenne est donc de 90%. Concernant la convention collective, l’indemnisation moyenne est inférieure à 90% (et donc moins avantageuse que la loi) si le nombre d’employés de moins d’un an représentent plus de 20% de la boite, ce qui est vraisemblable. C’est de toute façon un point de bascule très éloigné de celui des 50% d’employés (la majorité) sur lequel se base la réponse de l’entreprise, et qui me fait donc douter de leur bonne fois, d’autant plus que l’entreprise de ma conjointe, qui n’est pas réputée particulièrement généreuse, lui a versé un complément de salaire sans être même contactée (et ils ont une base d’employés bien plus « anciens »).
Je sollicite donc votre avis par rapport au bien-fondé de la réponse de mon employeur. Son interprétation est-elle correcte ? Quel texte de la Cour de cassation invoque-t-il (et ne serait-il pas tenu à minima de me le citer ?) ? La méthode de calcul pour la majorité des salariés plutôt que pour les individus (ou via pondération) a-t-elle un sens juridique ? Il me parait complètement aberrant que, sous prétexte que ma boite soit « généreuse » dans sa convention pour les employés de plus d’un an, les employés de moins d’un an se retrouvent en conséquence dans des conditions moins avantageuses que la loi (50% au lieu de 90% voire 100%)…
J’espère trouver dans votre réponse un peu d’éclairage, car après avoir fouillé les textes sans expérience juridique, je me retrouve face à une armée de juristes, qui me répondent par l’intermédiaire des RH (qui ne s’y connaissent pas plus que moi je pense), sans prendre même la peine de sourcer leurs affirmations comme j’ai essayé de le faire dans ma sollicitation (peut être maladroitement). La discussion me semble donc bien déséquilibrée et j'ai peur de faire une erreur en leur répondant directement sans prendre conseil au préalable. Est-il pertinent de recourir à un avocat dans ce cas (si toutefois il m’est confirmé que ce n’est pas mon employeur qui aurait raison sur toute la ligne malgré mon sentiment d’injustice) ?
Nous sommes sur une somme qui n’est pas anodine (500 euros). Je tiens donc à vérifier mes droits, et par la même occasion ceux de mes nombreux collègues de moins d’un an d’ancienneté qui je n’en doute pas, n’ont pas été tous épargnés par le covid, et sont donc également concernés.
Je vous remercie par avance pour tout élément de réponse, et pour m’avoir lu jusqu’ici.